S’attaquant avec la même force, aux natures mortes qu’au corps humain, le Cubisme fait voler en éclat la représentation du réel, déforme la figure humaine jusqu’à la monstruosité. Picasso qui, déjà en 1907 avec les Demoiselles d’Avignon, avait révolutionné l’art moderne, introduisant l’art ibérique et africain, se lance, dès 1908, dans cette aventure.

Le tableau est le dernier du cycle des Baigneuses sur la plage. Le corps humain traité de manière structurée et géométrique fait penser à la série des Femmes d’Alger d’après Delacroix, que Picasso avait réalisée l’année précédente. Les corps féminins, ici monumentaux, semblent se plier aux exigences du format qu’ils dépassent largement.

Surfaces planes et volumes s’imbriquent dans l’espace, et la peinture dialogue avec la sculpture, selon l’habitude de Picasso de passer indifféremment de l’une à l’autre. Les détails des visages, le motif du miroir à la main où se regarde la femme de gauche, se subordonnent à la puissante structure d’ensemble. La couleur elle-même, réduite à l’essentiel, détache les deux nus ocre-rouge du fond bleu pâle. Tandis que la figure de gauche dresse son torse à la verticale, l’autre s’incurve, prolongeant ce mouvement dans le cou qui se baisse pour finir dans le rectangle du bras.

Même si ce tableau est d’époque plus tardive, la multiplication des plans – fruit de l’éclatement du point de vue, ainsi que la simplification des volumes et la dépersonnalisation de la figure sont typiquement cubistes.